Yann Jomier

Hommage écrit et lu par Yann Jomier, jeune frère de Geneviève,  lors des deux cérémonies, à Paris et en Bretagne).

Chers cousins, chers amis, chers tous,

Merci à vous d’être là, présents pour Geneviève et témoigner ainsi de votre soutien et de votre amitié.

Notre reconnaissance s’étend bien sûr à toutes celles et ceux qui ne peuvent être ici aujourd’hui, mais qui se sont manifestés très nombreux.

Geneviève nous quitte sans prévenir, laissant un grand vide et une place à l’émotion. Mais c’est peut être aussi sa façon de nous bousculer, en nous donnant l’occasion de prêter l’oreille et d’entendre le témoignage de sa vie qui illustre si bien l’importance de bâtir des ponts plutôt que de se cacher derrière des murs.

Biographie

Geneviève est née à Ugine en Savoie et y passe les toutes premières années de sa vie.

Puis elle grandit en Lorraine à Hagondange au cœur du bassin sidérurgique, étudiera le Latin et le Grec jusqu’en 1ère à la Miséricorde, avant de passer un bac scientifique

Après une formation universitaire à Nancy, en math physique et en sciences économiques, elle passe son Doctorat de 3ième Cycle en Mathématiques appliquées.

Elle démarre sa vie professionnelle comme chercheuse et assistante à la Fac de Nancy, migre vers la capitale à l’INRIA, puis comme maitre de conférence, à l’Université d’Orsay.

Elle soutient sa thèse d’État en Sciences de l’information et de la communication, avant de devenir Professeur des universités à Paris Dauphine, de septembre 1989 à novembre 2016.

Afin de ne pas entrer dans un détail de sa vie au risque de se tromper, il nous a semblé être fidèle à Geneviève en parlant d’elle au travers de trois lignes de force, laissant à chacun la liberté de la retrouver où il le souhaite.

La force de l’Engagement

Sa vie professionnelle a été le champ d’un engagement entier et protéiforme, tant dans les projets de recherche conduits jusqu’aux limites de la connaissance, que par son implication dans l’institution universitaire en apportant sa forte capacité d’anticipation.

Cet engagement se retrouve évidemment dans l’enseignement et l’accompagnement des étudiants avec une constante attention à la transmission des savoirs, et ce côté professoral que d’aucuns lui connait, oubliant parfois que ses proches avaient peut-être passé l’âge ou l’envie d’être étudiant !

ATD Quart Monde a été une autre forme d’engagement, depuis le chantier d’été 1968 où elle participait, entraînant dans son sillage sa petite sœur Yvonne, et d’autres proches qui formeront bientôt une partie du noyau nancéen du mouvement. La fidélité de ce lien a perduré au cours du temps, avec sa participation à l’informatisation du mouvement, le lien avec ATD Burkina Faso et la permanence de son soutien…

Ces projets ouverts sur l’extérieur ne l’ont pas éloigné de sa famille, et c’est avec un grand dévouement qu’elle a été présente auprès de notre mère et à Rosnarho, consacrant son temps et son énergie à faciliter le quotidien et penser l’avenir des générations montantes.

Le goût des autres

Dans la relation duelle, son écoute et sa disponibilité sont entières. Nombreux sont ceux qui ont pu éprouver cette attention à l’autre, sa capacité à être simplement là au bon moment, à prendre le temps qu’il faut, à aider à réfléchir, à se poser et prendre du recul.

Le 91 rue Saint Charles, illustre aussi de la place de l’autre dans sa vie. L’acquisition de l’appartement mitoyen de son studio n’a eu pour vocation que de permettre l’accueil, qui de ses frère, sœur, neveu, nièce, filleul, ami, collègue, ou ami d’ami des quatre coins du monde, pour une nuit ou pour un an.

La famille au sens large est une valeur majeure pour Geneviève, grande spécialiste de la généalogie, capable de garder le lien avec le plus grand nombre, faisant vivre avec conviction la tradition d’accueil portée depuis de nombreuses décennies par notre grand mère, puis par notre mère à Rosnarho.

Très sensible au consensus et à la préservation des relations familiales, la discussion et la collégialité ont toute leur place, permettant à chacun d’être entendu dans son point de vue et de comprendre ceux des autres.

La fraicheur de l’émerveillement

Geneviève avait un mode de vie simple, passablement détachée des considérations matérielles, vivant le respect de la Planète et de son environnement comme une évidence au quotidien.

Respiration dans une vie professionnelle envahissante, elle a bourlingué sur les mers du globe, en méditerranée orientale, en atlantique, en manche, ou dans sa chère Bretagne. Dans ces eaux, pas un port ne pouvait lui être inconnu, les oiseaux de mer devenaient familiers et chaque étoile se devait d’être appelée par son nom…

C’était une véritable passion qu’elle partageait avec le plus grand nombre, comme chef de bord à Jeunesse et Marine d’abord, puis en embarquant ses proches, ses amis, ses collègues… pour des croisières plus ou moins lointaines et toujours inoubliables.

La Pologne, le Burkina Faso, ou plus loin la Californie, la Colombie, le Vénézuéla, etc.. ont été autant d’occasions pour elle de découvrir les belles choses du monde avec des yeux toujours émerveillés. Et surtout les rencontres, source d’un enrichissement réciproque, étaient vécues avec une grande considération de la culture et de l’histoire de l’autre.

Geneviève cultivait un univers sans cloison, sans égard pour les conventions inutiles, permettant des rencontres variées, inattendues et plurielles. Elle était convaincue que « mieux connaître l’Autre est un ferment de paix » et œuvrait au quotidien pour démontrer cette conjecture.

Heureux les artisans de paix car ils verront Dieu.

Yann Jomier – Date d’origine de la publication 1 avril 2018