En écoutant Yann Jomier à Paris, puis en découvrant tous ces témoignages, pourquoi écrire un message de plus. Ils évoquent tellement bien Geneviève et le trouble que nous commençons à ressentir après la sidération de sa disparition.
En lisant l’hommage d’Ivar Ekeland et sa citation d’Hérodote, je me suis pourtant décidé à déposer une pierre qui n’est en rien originale, mais pour faire nombre et contribuer à la mémoire. Nous étions si nombreux à l’apprécier, elle avait tissé tellement de liens.
Merci à Ivar Ekeland, par ailleurs, de nous donner les clés pour reconstituer le puzzle de la vie professionnelle de Geneviève. J’en connaissais différentes pièces, mais pas le tableau d’ensemble. Et quel tableau !
Je mesure mieux son désarroi quand les IUP ont fermé. Je me souviens de nos échanges passionnés quand Paris-Dauphine est devenue la 1ère Université sélectionnant les étudiants et augmentant les droits d’inscription, se spécialisant dans les mathématiques appliquées à la finance, orientations éloignées de ses valeurs. J’imagine l’énergie qu’elle a du mettre pour maintenir jusqu’au bout ce qui lui tenait à cœur.
Nous l’avions choisie comme marraine de notre 1er enfant, Romaric, c’est dire nos liens et leur ancienneté. Sa table ouverte à Nancy quand nous étions encore étudiants, ATD quart-monde à Nancy, à Pierrelaye, son accueil si chaleureux à Paris dont nous avons tant bénéficié à une époque, Marie-Christine ou moi, les discussions commencées tard et poursuivies jusqu’au milieu de la nuit… et des piles du Monde. Et quand les points de vue divergeaient, l’échange pouvait durer.
Me reviennent en mémoire :
Les séjours de ski à Tignes, une belle bande d’amis chez ses cousins.
Rosnarho, toujours l’accueil, les grandes tablées et leur rituel, le 15 août et son raisin dans la serre. Une remontée du Golfe sur le Vieux Gréement de Loïc au retour de la Trinité, moteur sans ralenti entre les parcs à huitres, et moi, vigie à la proue, qui n’en menait pas large.
Pour ma première journée de croisière vers les anglo-normandes, l’impressionnante entrée de nuit à la voile dans la passe de Chausey, avec Geneviève et Yvonne. Les autres équipiers, malades, s’étaient réfugiés dans le carré.
Suivirent d’autres croisières, ciels étoilés…, jusqu’à la dernière en 2007 dans les Sporades, avec Annie, notamment.
Toutes ces fêtes amicales ou familiales, où elle venait entre deux trains (ses étudiants… copies ou mémoires à corriger, cours à préparer).
Un extrait de son dernier message reçu en mars 2016, dans lequel, par ailleurs, elle renouvelait son invitation à venir chez elle, traduit, nous semble-t-il, ce qu’elle a vécu avec beaucoup d’entre nous :
« les mois passent et comme j’ai raté la Bonne Année je vous souhaite de Joyeuses Pâques et espère que 2016 nous donnera des occasions de rencontre. Pas de doute, ces dernières années elles sont bien trop rares. Heureusement que votre séjour chez Yvonne et Michel nous avait donné des occasions de nous voir…
Je me souviens de votre accueil toujours si chaleureux, de tant de nuits passés sous votre toit, tant de séjours nancéens, toujours trop courts, de Jean François me conduisant à la gare le dimanche soir, juste à temps pour ne pas rater le train de retour à Paris, et au dernier moment pour ne pas perdre une minute de la rencontre…
Je garde le meilleur souvenir de tous ces moments, de ces années.»
Nous en gardons non seulement le meilleur souvenir mais aussi la certitude qu’ils ont participé à faire de nous ce que nous sommes.
Jean-François et Marie-Christine